LONDRES (AFP) - "J'ai toujours été un gars plutôt candide au moment de coucher l'encre sur le papier...": le journal intime de Pete Doherty raconte la trajectoire
chaotique du poète musicien, son addiction à l'héroïne, et l'amour tumultueux pour sa muse Kate Moss.
"Books of Albion", paru jeudi, compile des extraits des cahiers noircis par Doherty depuis 1999. Le titre évoque l'un des thèmes de prédilection du rocker:
Albion, l'archaïque Angleterre, mythe et nostalgie d'un temps meilleur.
"Que ne donnerais-je pas pour traverser une époque où musique pop, culture jeune, changement
social et idéaux intelligents iraient bras dessus, bras dessous, langue contre langue", note-t-il, à 20 ans, dans les premières pages.
L'ouvrage se présente sous la forme de manuscrits fac-similés et inclut photos, collages et dessins, qui lui donnent un aspect moins linéaire qu'une
biographie ordinaire. En 1999, fraîchement arrivé à Londres après l'apogée de la "britpop", le jeune ambitieux lance: "Je veux créer un groupe que les
gens regretteront de rater et qu'ils seront obligés d'adorer". Il crée alors les Libertines, qui lui apporteront la célébrité dans le milieu du rock.
La dissolution des Libertines après deux albums marque le début d'une deuxième carrière pour Doherty: passage par la case prison, nouveau groupe, les
Babyshambles, plongée dans l'héroïne, et rencontre avec le mannequin Kate Moss, en 2005.
La machine s'emballe: de musicien idolâtré par une frange de la jeune génération, Doherty devient la cible des tabloïds anglais, qui s'intéressent plus aux frasques de "Junkie Pete" qu'à ses
disques. De retour d'un séjour à Paris avec Kate Moss, où il a saccagé une chambre d'hôtel dans la
grande tradition de la rock star, il écrit: "Les journaux sont pleins de blabla sur nos exploits parisiens. Le tout vaguement connecté à la réalité, de manière presque surréaliste... les torchons
semblent avoir pris une nouvelle résolution: écrire n'importe quelles conneries sur +le rocker perturbé+ et sa copine le top model".
Les cahiers consacrent une grande place à la concurrence entre ses deux addictions, l'héroïne et "Miss Moss", comme il l'appelle. S'il évoque crûment la première, en mots ou en photos, Doherty ne
craint pas d'être élégiaque quand il est amoureux, au rebours de son image de sale gosse révolté. "A toutes les mères célibataires amoureuses de camés,
vous êtes une brillante lueur d'espoir", écrit-il pour Moss.
Les dernières pages, datées de janvier 2007, écrites dans une clinique d'une main agitée, montrent un Doherty en souffrance, rêvant d'un "happy end". "Je
me rends à la science de la désintox et je prie Dieu pour que le plus dur passe vite, et samedi matin au plus tard je serai dans les bras aimants de mon amante. Quand j'aurai laissé tombé la came
et l'aiguille, nous nous marierons cet été et je deviendrai dix fois plus heureux que n'importe quel toxico. Hourrah". Dans sa chanson "Fuck Forever", il
s'interroge. "Quelle est la différence entre la mort et la gloire ?". Il a aujourd'hui 27 ans, l'âge auquel sont morts Jim Morrisson, Jimi Hendrix, Janis
Joplin ou Kurt Cobain.