
OIT trois touits récents sur le compte Twitter des correcteurs du Monde, autour, respectivement, de l’adjectif conséquent et des verbes réfuter et spolier, qui connaissent un glissement de sens dans la presse écrite et parlée :
· Propos d’un responsable de l’ESF sur le comportement parfois inconséquent des skieurs : « Nous faisons face à un public conséquent et divers dans sa façon de pratiquer ce loisir ». Où l’on constate qu’employer « conséquent » à la place de « large » ou d' »important » brouille le message.
· Lu dans la presse : « Boris Johnson réfute », etc. Pas vraiment. Réfuter, c’est « démontrer la fausseté d’une affirmation par des preuves contraires ». B.J. se contente de démentir les accusations portées contre lui. Démentir et réfuter ne sont pas synonymes.
· « Spolier », c’est dépouiller quelqu’un. Donc, on ne spolie pas une œuvre. Mais la presse emploie de plus en plus ce verbe dans ce dernier sens, le transformant en simple synonyme de « voler ».
Dans la presse en tout cas, conséquent a de plus en plus le sens d’important, voire considérable, qui semble écraser le sens premier. Le dictionnaire Petit Robert connaît ce sens, en le qualifiant de familier et en ajoutant qu’il est contesté.
Réfuter et spolier sont désormais employés par la presse respectivement comme démentir et voler. A noter que le Robert ne connaît pas ces sens dérivés. Réfuter devient donc insensiblement un synonyme de démentir, et spolier de voler.
Qu’ajouter ? Primo, que les dictionnaires sont en retard sur l’usage.
Secundo, que nous avons là des pertes de sens indubitables, mais manifestement non résistibles.
Après tout, cela arrive à beaucoup de mots. Par exemple, considérable a d’abord eu le sens de notable, remarquable, avant de prendre le sens qu’on lui connaît maintenant d’énorme, immense, qui a plus ou moins évincé le premier.