20 ans déjà ! Bali, Jérôme Garcin, Cinéma et séries d'antan
Par Kitano
On est sur la plage, il est proche de 17 heures, je viens de sortir de l’eau. Les drapeaux sont rouges, une fois de plus comme ma vitalité qui ressemble à une batterie déchargée sur l’icône rouge. Je sens que mon ventre gargouille. Trois possibilités : la nourriture, un des fruits que j’ai mangé hier sans le peler (c’était du belimbing, ce fruit qui coupé donne une forme en étoile) ou alors c’est le fait que je me rince les dents avec l’eau du robinet. Fred le fait depuis des années. Il me dit que cela ne risque rien sauf si l’on a une plaie à la bouche.
Quoi qu’il en soit, je dois sortir ma boîte d’Imodium. Rapide calcul mathématique, j’ai 20 gélules avec une prise de 6 par jour maximum, je peux donc tenir entre 4 et 20 jours selon le cas. Il va falloir que je passe au thé le matin, que je mange du riz et que j’évite les fruits et laitage.
Cela me ramène en mémoire les trois fois où j’ai dû utiliser ce médicament. La première c’était .. ici, à Candi dasa où j’avais commandé un jour à l’avance un canard laqué. Le canard est passé pas le laquais. Une mauvaise nuit. Je se souviens surtout que le lendemain après-midi, je vais dans un restaurant commandé ce qu’il y a de plus simple, à savoir du thé et du riz et que j’ai dû attendre au moins 20 minutes avant l’arrivée des plats. Avec le recul, je pense que le personnel avait fini le service et qu’ils ont dû recuisiner pour moi. Enfin, je n’étais pas bien du tout.
Autre pays, autre année avant le XXIe siècle, le Laos. L’après-midi, je visite les temples mais le soir, je suis ko. Je vais rester aliter un jour. Je me souviens que l’employé m’emmenait du riz. Pour le remercier, je lui ai donnée des échantillons de parfum de France, produit très prisé.
Enfin, c’était il n’y a pas si longtemps, New Delhi. Je vais dans un restaurant, pour une fois moi qui mange souvent dans la rue, et j’hésite avant de choisir du mouton. Faute, simple faute mais lourdes conséquences. Je vais perdre 7 kilos, me traîner une diarrhée pendant 4 semaines et craquer à Bombay. J’étais à l’Armée du salut, endroit intéressant pour rencontrer des voyageurs, des vrais, moins tatoués qu’ici. En Inde, il est encore plus aisé de rentrer en contact avec des voyageurs car les conditions et l’environnement sont tellement difficiles que cela pousse à partager ses émotions. Je suis donc dans ce bâtiment, certes ancien mais qui a du cachet. Le souci, c’est que je dois manger du riz et allez faire comprendre à un indien que vous ne voulez manger que du riz, sans sauce, certainement pas avec du piment. Car même la nourriture qui n’est pas « spicy » est pour nous très pimentée.
Ce qui va me faire craquer c’est que je m’aperçois que le voyage ne doit pas être source de douleur ou d’épreuves que l’on ne mérite pas. Je suis dans un dortoir où les matelas ont plus que vécu, la couleur blanche a disparu. Je me demande pourquoi, ils n’en changent pas vu que le dortoir est toujours plein. La douche et les toilettes n’ont pas d’eau courante, il faut prendre l’eau avec un ustensile dans un tonneau qui est souvent vide ! Je me dis, je perçois que je me fais du mal, trop de mal. C’est à ce moment précis que je décide et de changer d’hôtel et d’arrêter de voyager petit budget et d’accepter que le voyage est d’abord un plaisir et pas une épreuve. J’ai donné.
Je vais dans un hôtel où la chambre est petite, toute petite voire minuscule mais c’est propre, j’ai la télévision et surtout les toilettes sont propres. Cela ne résout pas mon problème d’intestin. Je vais dans une pharmacie pour demander des cachets, des cachets indiens. J’aurais dû y penser plus tôt. Ils sont quatre fois plus gros que les gélules françaises, de couleur jaune (je m’en souviens encore), le gars me dit : « tu manges et tu en prends un ». Je pense tout de suite « encore un mensonge indien, ici ils sont tous pareils ». Le soir, je mets en œuvre le plan. Réussite totale. Tellement totale que je ne vais plus aller aux toilettes pendant tout le reste de mon voyage, j’en aurais presque du mal à marcher ! Ce qui est drôle, c’est que lors de mon arrivée en France, à l’aéroport, ma première envie a été d’aller aux toilettes. J’étais guéri. Guéri de ces longs voyages seul, à vouloir toujours aller plus loin dans « la frontière ».
Tous les voyages qui suivront se feront ici, à Bali, statique. Il y a beaucoup moins à raconter de sensationnel (cet accident de car vécu en Inde avec le chauffeur qui s’enfuit avec les clés et mon sac à dos dans le coffre avec un motocycliste mort, mon arrivée à l’hôtel sans prendre la carte et un retour sous tension car je m’étais perdu !) mais cela est vraiment plus reposant. En plus, depuis ces années, j’arrive à tisser certaines relations amicales avec les indonésiens et maintenant avec mes enfants, je suis passé dans la meilleure catégorie, celle de la famille. En plus, mes enfants plaisent. Ils sont plus blancs que les indonésiens, ont les traits plus fins que les enfants de couples mixtes et savent (au moins pour le tout petit) les faire craquer en faisant un ‘give me 5’, en faisant un coucou, envoyant un bisou. Le record fut celui de l’an dernier avec 17 personnes autour d’eux. Cela en était gênant pur eux.
Symboliquement, j’ai jeté mon sac à dos (en disant aux autorités compétentes qu’il y avait mon passeport – celui qui avait tant de tampons) et écoute l’air un peu amusé ces jeunes qui veulent découvrir que personne n’a vu avant eux, découvrir le vrai (sans parler indonésien et sans que l’indonésien ne parle anglais) ou alors fasse des expériences comme manger des fleurs dans une tribu (un français en était mort, empoisonné avec préméditation par un indonésien qui en voulait à son argent – 150 € !).
Mes aventures maintenant sont celles avec mes enfants, leur transmettre le flambeau du voyage, une histoire familiale, un Adn de la découverte, qu’ils sachent s’adapter, communiquer et déceler autant que possible l’amitié et le partage.
A bientôt car sans Toi, c'est pas pareil ! - Hébergé par Overblog