20 ans déjà ! Bali, chaîne de Jérôme Garcin, Cinéma et séries d'antan pour 2025.
24 Février 2014
Disparition | Il avait écrit et joué dans le méga succès “SOS Fantômes”, mais c'est son inusable comédie avec Bill Murray qui fait d'Harold Ramis un homme important. Il est mort ce lundi 24 février 2014, à Chicago, des suites d'une longue maladie.
Au début des années 2000, on avait poussé jusqu’à Chicago : Harold Ramis sortait Endiablé, remake moyen d’une comédie de Stanley Donen. Certains collègues s’étaient émus : pourquoi donc faire des kilomètres pour cet obscur réalisateur de comédies ? Parce que c’était l’auteur d’Un jour sans fin, pardi… Quinze ans plus tard, alors qu’Harold Ramis vient de mourir, à 69 ans, on ne regrette décidément pas d’avoir fait le voyage. Parce qu’Un jour sans fin n’a pas quitté nos mémoires – il s’y réinstalle même plaisamment à chaque diffusion. Il annonçait peut-être inconsciemment le mouvement perpétuel des chaînes ciné de la télé d’aujourd’hui : c’est un film sans fin, un film qu’on ne cesse de revoir, plaçant le spectateur quasiment dans la peau de son héros.
Comme Phil, d’ailleurs, on aurait du mal à mettre au jour la première vision. Qui l’avait vu passer à sa sortie, à l’été 1993 ? Bill Murray n’était pas l’acteur-culte de Wes Anderson, Harold Ramis n’était que le scénariste et interprète (du docteur Egon Spengler !) de SOS Fantômes. Groundhog day, le jour de la marmotte, ça ne disait rien à personne. Et puis le film avait fait son office : géniale histoire d’un homme se réveillant chaque matin le même jour – au son progressivement horripilant de I got you babe, interprété par Sonny & Cher ; géniale histoire d’un misanthrope snob, assez goujat, piégé au trou du cul du monde, dans une petite bourgade peuplée de gens sortis d’une comédie de Capra – l’horreur de la gentillesse sans fin. Bill Murray endossait tour à tour l’arrogance, la rouerie, la résignation, puis la sagesse, tous les états que traversait son personnage. Une leçon de vie. Qu’est devenu Danny Rubin, inventeur de cette histoire, et coscénariste avec Harold Ramis ? Mystère.
Au début des années 2000, donc, on avait senti Harold Ramis un peu déprimé. Ce grand type bouclé avait fui Hollywood pour la banlieue de Chicago – une petite ville qui ressemblait à celle d’Un jour sans fin. En 1999, il avait eu un beau gros succès avec Mafia blues – Billy Crystal en psy, De Niro en mafieux névrosé. Mais le film n’était pas gracieux – et déjà, à l’époque, les plus éveillés (dont on n’était pas) disaient qu’une petite série baptisée Les Sopranos, c’était mieux… Sa suite, Mafia blues 2 – La rechute, en 2002, ne vaudrait pas tripette, ni esthétiquement, ni commercialement.
Ramis avait débuté à la fin des années 60 dans la troupe comique de Second city, aux côtés, notamment, de Bill Murray et John Belushi. Ce dernier avait emmené quelques-uns de ses compagnons de rire à New York pour les déclinaisons radio, puis télé, du mensuel parodique le National Lampoon. Ramis aimait écrire et jouer, c’est pourquoi il avait refusé les propositions du Saturday Night Live. « Je voyais comment ils travaillaient : tout le monde sous cocaïne, des tournages au milieu de la nuit. Désolé, j'avais envie de vivre un peu plus vieux. », nous avait-il raconté.
La troupe comique avait été happée par Hollywood, avec des fortunes diverses, sur des projets inégaux. Il y aura bien quelques cinéphiles fous pour réhabiliter par exemple Le Golf en folie !, le premier film de Ramis réalisateur, co-écrit avec le frère de Bill Murray – qui a d’ailleurs un petit rôle dans Un jour sans fin… Suivirent des années d’écriture, quelques rôles, un peu de mise en scène... et le méga-succès de S.O.S Fantômes, en 1984, co-écrit avec Dan Aykroyd et Rick Moranis. Les comiques, qu’ils soient cinéastes ou acteurs, ont souvent une date de péremption. Le dernier film d’Harold Ramis, L’an 1, en 2009, avec Michael Cera et Jack Black en hommes préhistoriques, a déçu. Le cinéaste avait ensuite signé quelques épisodes de The Office. Puis s'est tu. On l’avait vu comme acteur, en 2007, dans En cloque mode d’emploi (il joue le père de Seth Rogen), hommage d’une génération d’auteurs-interprètes de comédie (celle de Judd Apatow) à leur aîné. Juste hommage. Un regret : il devait tourner en 1982 une adaptation de La Conjuration des imbéciles, de John Kennedy Toole, avec John Belushi. Belushi est mort en mars, le projet a capoté, et Harold Ramis est devenu quasiment le cinéaste d’un seul film. Mais quel film !