LA BELLE PERSONNE
Christophe Honoré a la carte que Michel Ciment nomme ‘le triangle des Bermudes‘ : encensé par la critique des Inrocks, Le Monde et Les cahiers du cinéma. Son précédent film - DANS PARIS (2006) - avait reçu un accueil enthousiaste des mêmes références. Pour la découverte de sa 6e réalisation, je m’attendais à l’adaptation de la Princesse de Clèves mais pas à tant de clichés qui ne purent m’amener que du sourire tant ce qui était présenté était surfait, décalé, accumulation de poncifs.
Le roman de Madame de La Fayette, au XVIIe siècle, présentait une jeune fille mariée avec le prince de Clèves (homme à la droiture morale) pour la raison et dont une rencontre (le duc de Nemours) va faire naître une passion qui ne pourra être consommée par obligations.
De nombreuses fois, j’ai pensé au ELEPHANT, notamment pour cette scène – photo de l’affiche - de la jeune fille venant embrasser la joue de son camarade. Il y a toute l’adolescence dans cette scène, je dirais qu’elle lui fait un bisou et non une bise. Gus Van Sant avait tout perçu de cet âge, Christophe Honoré n’en a retenu que sa vision déformée dans un lycée où l’on se comporte comme des collégiens surtout dans les regards dans la classe. Visiblement, il a oublié ou doit sublimer sa mémoire.
Il en devient même irréaliste : un professeur ne laisserait pas sortir seul un élève de sa classe. Cela s’aggrave avec le rôle de Louis Garrel, le jeune professeur – pas crédible – d’italien cumulant une liaison avec une de ses collègues et une de ses élèves ! On rit presque lorsqu’il déclame : « je suis en absolu désespoir amoureux ». Plus tard, il fait même une faute d’orthographe en n’employant pas le pluriel du mot amour au féminin. Improbable aussi est la phrase de Marie (Agathe Bonitzer, du club fils/fille de) à Junie : « il faut que je te dise que j’entretiens une relation physique avec ton cousin ».
Cela empire avec la manière pitoyable par laquelle le réalisateur décrit les amours homosexuelles. On peut même se demander l’utilité de la présence d’une voiture immatriculée 11 (l’Aude) dans une action censée se dérouler à Paris. Une dernière pour la route ou plutôt dans la rue, avec la chanson chantée par l’insignifiant Grégoire Leprince-Ringuet qui s’avère piètre interprète. La chanson d’Alex Beaupain prend plus de résonance dans son album (chantait en trio avec notamment Ludivine Sagnier, interprète du précédent Christophe Honoré - titre que l’on retrouve dans le cd de la rentrée musicale de septembre des …. Inrocks).
Je préfère arrêter ici la litanie et en revenir au rôle principal joué par Léa Sedoux : adolescente au visage diaphane et au teint porcelaine avec des yeux bleus souvent rougis par les larmes. Malheureusement, on saisit mal son caractère changeant comme le vent. La scène où elle dévoile sa poitrine n’est que mauvais goût.
Incapacité à l’adaptation et à la profondeur, transposition ratée, préciosité, Christophe Honoré dit avoir été motivé pour ce projet suite à la déclaration du Président de la République sur l’utilité du roman de la Princesse de Clèves. C’est l’utilité de son film qu’il devrait se poser.