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LASTDAYS

BALI 7 : Au revoir les vagues

28 Juillet 2015 , Rédigé par Kitano Publié dans #Voyages

Il y a des jours avec et des jours sans. Aujourd’hui est un jour, avec enfin presque.

 

Cette fois pas de petit déjeuner car il faut que je sois un des premiers sinon le premier au Consulat mais pas trop tôt non plus. Je me lève sans réveil avant 8 heures, je ne sais pas comment aller au Consulat. Hier soir, personne au Komala pour m’emmener et personne non plus aujourd’hui.

Je prendrai le petit déjeuner plus tard, mais je commence ce jour avec une boisson énergisante. Je vais à l’office du Komala et l’employé me dit qu’il est à son poste pour toute la matinée car il n’y a personne d’autre. C’est vraiment dommage pour moi cette réduction d’effectif ! Il m’indique la petite boutique, celle où j’achète le gallon d’eau.

J’y vais, le mari m’annonce un prix en me disant que pour l’aéroport c’est deux fois moins cher mais il y a pour ma course, de l’attente. Je préfère assurer la sécurité dans tous les sens du terme que de jouer au hasard pour économiser un euro. Il y aurait eu le taxi mais celui ne m’aurait pas attendu et vu que le Consulat est loin du trafic d’une grande route, cela n’aurait pas été une option raisonnable avec mon mollet qui me fait souffrir.

 

Ketut va donc me mener au Consulat. Il va me raconter sa vie. Il vient d’un village à côté d’Ubud, sa femme s’appelle aussi Ketut car en Indonésie on donne à l’aîné le prénom de Wayan, le second Made ensuite Nyoman et le quatrième c’est Ketut. Pas de Louane ou de Pierre-Henri. Il prend un autre chemin que Wyanan. Je trouve que le premier était plus simple et rapide. Il y a de la circulation.

Nous arrivons à 9h04. Première bonne nouvelle, la porte B close le vendredi est ouverte. Une jeune femme mince et douce m’accueille et me fait remplir un bordereau. Quatre personnes avant moi, dont la première pour une perte de passeport. C’est la saison. Les autres, ce sont pour des affaires familiales et des papiers. En écrivant mon nom, la jeune femme avec des lunettes me dit « c’est pour un passeport perdu, je crois que l’on a reçu un mail ». J’avais juste eu le temps de lui dire que j’avais perdu mon passeport et que je voulais savoir s’il fallait que j’aille le chercher à Jakarta. La réponse fut négative et la deuxième partie de sa réponse éclaira en moi un espoir.

Elle avait reçu un mail les informant que mon passeport avait été retrouvé avec un numéro de téléphone. Elle appelle, on lui répond, elle dit que je suis devant elle et que je peux venir chercher mon passeport mais la personne lui dit qu’elle va me l’apporter. Je pense, à ce moment, que je suis en relation avec l’immigration. Après avoir répété quatre fois la convenance du lieu et de l’heure et en ayant répété quatre fois que le Consulat était ouvert de 9h à midi, elle me dit que la personne viendra  m’apporter mon passeport à 10 heures. Je mentionne mon numéro de téléphone et lui demande de tester la ligne, on ne sait jamais, personne ne m’a appelé ! La ligne fonctionne.

 

Maintenant, l’attente. Ketut a froid, il veut boire un café et prendre une brioche dans une petite boutique type débarras, du même coup il m’en offre aussi. En discutant avec lui, j’apprends qu’une location de moto coûte 50 000 roupies pour un jour. J’ai payé le double pour venir ici. J’aurais facilement fait le chemin aller, le retour un peu moins.

Il me dit qu’il paye 4 millions de roupies par moi  (soit environ 275 euros) son  appartement, qu’il a deux enfants qui vont à l’école et que cela coûte cher. Il finira sa vie dans son village où la vie est moins chère sans avoir à payer de loyer. En l’écoutant me parler, je vois passer des lycéennes français, je reconnais dans un sac transparent, un livre de la collection Que sais-je ?

Ketut me dit le prix d’un terrain de 100 mètres carrés à Kerobokan mais je n’ai pas compris. Cela doit être cher car j’avais vu le prix d’une maison, une belle maison avec piscine, pour presque deux milliards de roupies ( 2 000 000 000) soit environ 150 000 euros. Il me dit qu’en France, on gagne beaucoup d’argent mais je lui mentionne la liste des taxes et impôts ainsi que le prix de l’essence et les températures en hiver. Il est étonné.

Il est dix heures, nous revenons vers le Consulat mais mon téléphone n’a toujours pas sonné. Si la personne ne vient pas, le Consultat m’informera par mail. Je préférerai par téléphone car j’ai des soucis techniques avec ma boîte mail qui ne s’ouvre pas. Heureusement, j’ai Outlook qui fonctionne et qui est lié avec ma boîte mail et avec laquelle – oh surprise par rapport à mon autre micro – je peux répondre !

Une femme croisée vers le bureau d’accueil est sortie. Elle s’en va dans une grosse voiture avec chauffeur. Toujours l’attente. Et puis, une moto arrive. Un jeune homme descend, il me voit et sourit. Visiblement, il me connaît. Il sort de sa main un passeport. Je lui serre les mains, nous allons au bureau d’accueil, il me tend le passeport, je le montre à la jeune femme. Voilà, j’ai un ange gardien de plus à Bali.

En sortant, je lui propose des billets mais il refuse : il a fait cela par pure aide, il me dit savoir combien un passeport est important. Je lui propose de passer à mon hôtel pour lui donner des cadeaux de France (j’en ai toujours) mais il refuse. J’arrive juste à obtenir son adresse mail et en partant son prénom. Il s’appelle Poutou, c’est un prénom qui sonne doux.

Grand moment d’émotion que cette rencontre furtive avec ce jeune qui travaille à Denpasar dans un hôtel et qui a quitté pour une heure au moins son emploi pour moi. Je lui dis que maintenant il est mon ami mais il me dit que ce qu’il a fait est normal.

Le film de la perte se reconstitue : je vais au bout de la Legian dans le change, je donne mon passeport, elle me le redonne mais au lieu de le remettre dans une des poches de ma banane, je le mets entre ma banane et mon pantalon, je marche et il tombe. Si le Consulat avait été ouvert vendredi, l’affaire aurait été réglé mais tout est bien qui finit bien.

Retour à l’hôtel, direction le safety box. Plus jamais mon passeport ne sortira de là. J’en profite pour faire le change mais cette fois à la Post office. Le seul inconvénient c’est qu’ils n’ont pas de petites coupures mais qu’importe. Je suis encore millionnaire … en roupies !

De retour à l’hôtel, je croise Pascal. C’est un français d’une quarantaine d’années qui suite à un contrôle d’alcoolémie a perdu son emploi de chauffeur. Il en a profité pour changer de vie : tout vendre (il ne lui restait que deux sacs) et partir à l’étranger. Au départ, il n’a pas demandé le chômage mais en allant en Guadeloupe pour suivre un français qui lui disait qu’il y avait un travail (qu’il ne trouvera jamais), les autochtones lui conseilleront de faire une demande d’allocations chômage. Résultat : 14 mois d’indemnisations à venir avant le RSA. Il sait qu’avec son statut, on lui payera le permis, ce qui lui permettra de pouvoir travailler en Australie avec un meilleur salaire.

Car il travaille trois mois en Australie mais pas déclaré. Au bout de ses 90 jours, il a un pécule de 6 000 $ australien et il peut repartir en voyage. Seul souci, la douane. La première fois, les autorités pensaient qu’il passait des images ou films pornographiques (il y aurait un marché du sexe en Australie), la seconde de la drogue (avec passage en revue des bagages) et la troisième qu’il travaillait illégalement avec seulement 700 $ en poche. Il a dit qu’il connaissait des amis. D’ailleurs, ses petits travaux, il les trouve par relations. Pascal va revenir en France pour mettre à jour ses papiers, passer son permis, voir sa famille et repartir pour monter une affaire avec sa copine, à Ubud.

Il est temps de manger et de prendre des nouvelles par Internet. Trois mails de ma sœur et un article de journal avec comme expéditeur mon nom. Sur le premier, j’apprends que le fils de Nick Cave est mort accidentellement. Je me souviens de la photo de l’australien avec son petit dans un numéro des Inrocks, il y a une quinzaine d’années. Sur l’autre, des nouvelles que mon frère a un nouvel appartement, enfin le dernier a le prénom de mon neveu.

Cela n’est pas de bonne augure mais à moins de trente ans, il peut lui arriver tant d’aventures. Je lis la première phrase mais comme il n’y a pas de ponctuation, je ne comprends pas, je lis « mon frère est mort ». Je pense que c’est un mail par erreur comme pour ce lien vers un journal régional. Mais non. Après la confusion, la triste réalité : mon neveu est mort d’un accident de voiture le dimanche matin. Une clio contre un arbre. L’arbre n’a pas plié. Il était seul. Fatigue, tentative de suicide, autres pistes. La police le dira. Je l’avais vu quelques jours avant de partir, il devait nous quitter après le repas et avant 14 heures car il devait faire courir les chiens de la Spa en tant que bénévole. Je ne serai pas à l’enterrement. Apparemment, il voulait se faire incinérer. On se reverra plus tard, on a le temps maintenant.

C’est le temps d’aller « se combattre » contre les vagues. J’ai beau dire à mon aîné qu’il faut dire combattre, il est bloqué sur la forme pronominale. Nous allons direction la plage mais aujourd’hui pas possible de se baigner forts courants. Je discute avec le lifeguard, je lui demande où est Marcello, mon sauveteur d’il y a 4 ans. Il était dans notre secteur pendant des mois, maintenant il est affecté vers le Kudeta, un bar près de la plage qui regroupe expatriés et touristes qui veulent se montrer ou alors ne pas se mélanger avec le commun des touristes. Touristes dans notre coin de plages qui sont en majorité indonésien. C’est une tendance lourde que je vois même au Komala. Même au Best Western, on croise des femmes voilées.

Le soleil se couche lentement et nous, nous continuons à nous courir après, à construire un barrage, à mettre le ‘turbo’ (courir encore plus vite) ou prendre ‘la vache mobile’(inspiré de La ferme en folie je crois, un dessin animé de synthèse) pour attraper l’autre.

La pénombre arrive, il est temps de pratiquer notre rituel qui est de faire au revoir aux vagues. Aujourd’hui, ce n’est pas à elles seules que je vais dire au revoir.

 

 

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T
Lu .... C'est le fils a Do ?
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K
non il n a que des filles ... c est a pat